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Robert Redford croit au silence

Publié le 22 mai 2013 dans Actu ciné

Robert Redford tient un rôle solitaire et quasi-muet dans All is Lost de J.C. Chandor.

Les jours se suivent et les légendes se succèdent sur les marches du Palais du Festival de Cannes. Seul l’âge varie. Après Michael Douglas, dont l’interprétation dans Ma vie avec Liberace pourrait lui valoir un prix d’interprétation à 68 ans, Robert Redford a fait rêver tous les cinéphiles du haut de ses 76 ans. Quel charisme. Et quelle présence dans All is Lost de J.C. Chandor. Une version très particulière du “Vieil homme et la mer”. Il y incarne en effet le skipper solitaire d’un voilier qui tente tant bien que mal de sauver son bateau des avaries. Un rôle quasi-muet et très physique. “Il n’y avait que 12 lignes de répliques, explique-t-il, facétieux. C’est un vrai challenge de se retrouver seul, sans béquille pour se rattraper comme les dialogues. Cela m’a attiré. Je venais de terminer mon propre film et j’avais envie de me donner entièrement à un réalisateur.” Avant d’ajouter malicieusement, en faisant référence à sa présidence du Festival de Sundance : “Aucun réalisateur indépendant de ces 40 dernières années ne m’avait jamais proposé de tourner dans son film. J.C. Chandor oui !”


A demi-mot, il laisse entendre que ce fut parfois vraiment pénible. “J’ai eu des regrets tous les jours (rire). Ai-je eu envie de tout plaquer ? Non. Pas toujours… J’étais coincé : où pouvais-je aller ? C’était difficile. Je devais faire de mon mieux. J.C. Chandor se montre assez strict, tenace. Il se tient à sa vision. Mais il fait montre aussi d’un grand respect pour mon bien-être et cela me poussait à me donner à fond. Si j’avais échoué, cela n’aurait pas été bon pour mon ego.”


Fidèle à lui-même, Robert Redford déborde rapidement sur les thèmes écologiques (“Je pense que nous arrivons à une situation catastrophique. La planète essaie de nous parler. La Terre est chaotique aujourd’hui”) et sur son sujet de prédilection, la politique. “Je suis né avant la Deuxième Guerre mondiale. Mes premiers souvenirs sont liés à la guerre. Aujourd’hui, les USA changent. On perd des valeurs. Notre système de croyance s’étiole. En raison de scandales comme le Watergate ou l’Iran. Moi j’ai grandi à une époque où les croyances dans le système américain étaient établies. Puis les choses ont changé et j’ai voulu montrer ce que je ressens : derrière la propagande, il y a des choses grises qu’on essaie de nous dissimuler...” Même la technologie ne trouve pas grâce à ses yeux. “Elle accélère tout. Tout va plus vite. C’est un rythme de vie fascinant, mais combien de temps avons-nous avant d’être usés ? On ne prend plus le temps de la réflexion. Ce film va à l’encontre de la société actuelle. Il y a le temps, un bateau, un homme. C’est tout.” 


Et de conclure par une ode au silence. “Je crois en cette valeur. Aussi bien au cinéma que dans la vraie vie. Le silence oblige à faire confiance au réalisateur et à vivre pleinement le rôle. Il rend libre. Cela dit, je n’ai pas encore vu le film. Ce sera pour ce mercredi soir. Si cela tombe, c’est très mauvais (rire). En tout cas, c’est une œuvre plutôt existentielle puisqu’elle laisse place à une interprétation très personnelle pour chaque spectateur.” Et d’évidence, il aime ça. Au point d’être prêt à remettre le couvert dans un autre film indépendant. Quelle santé.


Patrick Laurent, à Cannes

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